La Croix bleue, structure publique dédiée à la prise en charge complète des personnes addictes aux drogues mène un combat farouche pour sauver les accrocs de leur dépendance. En moyenne, soixante nouveaux cas sont enregistrés chaque semaine dans cet établissement sanitaire.
La Croix bleue fait partie des principales structures publiques qui offrent une prise en charge complète aux personnes dépendantes à la drogue ainsi qu’à leurs familles. Cette prise en charge a plusieurs formes et se fait à différents niveaux. Le volet médical est géré par les médecins, le volet social, lui, est confié aux assistants sociaux et enfin le volet psychologique qui dure le plus bien évidemment est l’affaire des psychologues.
« Quand on a un nouveau patient, on s’intéresse à lui mais aussi à sa famille. Pour mieux suivre un jeune dépendant, il faut savoir comment il a grandi, les difficultés qu’il a rencontrées dans son évolution. Et si ces difficultés ont un lien avec la famille, on ne peut pas l’occulter dans la prise en charge du patient. Il faut régler le problème à la source. La prise en charge nous amène à aller jusqu’à suivre le patient dans son fumoir. Car, il faut le faire sortir de là », explique le psychologue Dr Jean-Sébastien Kouadio.
Et d’ajouter : « nous recevons des patients qui nous disent qu’ils sont devenus dépendants à la drogue à cause de leur famille, mais le parent ne peut pas s’en rendre compte. Et quand il y a un addict dans une famille, c’est toute la structure familiale qui s’en trouve bouleversée. Les parents deviennent ceux qu’on appelle les co-dépendants puisque la dépendance de leur enfant à la drogue change leurs habitudes ».
Des enfants sont touchés
Dr Jean-Sébastien Kouadio est un habitué des cas. A l’en croire, l’établissement en reçoit en moyenne une soixantaine par semaine, essentiellement des jeunes âgés de 12 à 34 ans. Et ils sont polytoxicomanes c’est-à-dire qu’ils consomment différentes types de drogue. « De plus en plus, on reçoit des enfants. La dernière fois, j’ai reçu une fillette de 12 ans en classe de Cm2, j’ai pleuré quand elle est sortie de mon bureau. Elle était venue d’une ville de l’intérieur. Elle consomme l’héroïne et la cocaïne et elle en vend », se souvient-il.
Tout le monde peut être sauvé, à condition…
Selon ce spécialiste, on peut sauver tous les accros, à condition de suivre la bonne méthode.« Tout le monde peut être sauvé de la drogue, quel que soit le degré d’addiction. A condition que le patient lui-même soit conscient qu’il est malade. Celui qui veut s’en sortir s’en sort », affirme le psychologue.
En effet, selon lui, l’addiction à la drogue est une maladie comportementale. En fait, toute addiction, avec ou sans substance, que ce soit à l’alcool, à la cigarette, à la drogue ou aux jeux vidéo est considérée comme maladie par l’Organisation mondiale de la santé (Oms).
« Certains arrivent ici déjà conscients qu’ils sont malades. Ceux-là, on les conduit directement chez le médecin et la prise en charge sanitaire débute immédiatement pour soigner les organes détruits par la consommation des drogues. Mais dans beaucoup de cas, le patient ne sait pas qu’il est malade. Il faut donc que nous les psychologues l’amenions à en être conscient avant tout processus », explique-t-il.
La guérison après cinq à six rechutes
A l’en croire, la prise en charge des accrocs prend beaucoup de temps. Elle peut s’étendre sur plusieurs années. Car le taux de rechute est élevé et les parents de l’enfant dépendant devraient le savoir.« Le taux de rechute est élevé dans le traitement des drogués. Car l’addiction est une maladie à rechute. La guérison intervient souvent après cinq à six rechutes. Pour qu’on puisse dire qu’un individu est sorti de son addiction, il faut au minimum trois ans sans consommation. Mais pendant tout ce temps, il se stabilise et rechute à plusieurs reprises. Il ne faut donc pas mal interpréter la rechute au risque de plonger encore le patient dans son addiction », conseille-t-il.
Ces signes qui doivent interpeler !
Selon le psychologue, la prévention reste le meilleur moyen qu’il conseille à tout parent pour éviter de voir leur enfant devenir dépendant à la drogue. Pour ce faire, les parents devraient être particulièrement attentifs à ces symptômes et comportements chez leur enfant : la somnolence, les yeux cernés et rouges, les reniflements, l’irritation ou la sécheresse de la gorge, les paroles abondantes, le sommeil régulier, la perte de poids, les odeurs inhabituelles sur les vêtements, les gestes saccadés et les frottements réguliers du nez, les réponses évasives à des questions simples et les petits vols.
« Les parents doivent être en alerte lorsqu’ils remarquent ces nouveaux comportements chez leur enfant. Quand on est dans les débuts, c’est plus facile de le traiter. Aussi, dès que l’enfant commence à fumer la cigarette, le parent doit être en alerte. Car la plupart des dépendants à la drogue ont déjà touché à la cigarette, qui est aussi une drogue. C’est la porte d’entrée», conseille-t-il.
FAUSTIN EHOUMAN